Congrès du PS : enjeux et premiers résultats

La Rédaction
par La Rédaction
le jeudi 05 juin 2025

Ces derniers mois, Nancy est sur le devant de la scène. Après la signature du traité de Nancy entre la France et la Pologne le 9 mai, c'est au tour du congrès d'un parti politique de se tenir dans notre ville. Ce jeudi 5 juin, les adhérents et militants du Parti socialiste sont invités à élire leur nouveau Premier secrétaire national, dirigeant de l'exécutif partisan, en marge de ce 81e congrès. En attendant les résultats, nous vous décryptons les enjeux.

Après la NUPES et le NFP, rejouer Marseille ?

Longtemps attendu par les opposants comme par les partisans d'Olivier Faure, actuel Premier secrétaire, ce congrès est censé permettre aux militants de clarifier la ligne suivie par le Parti socialiste. Il n'est plus vraiment question d'éluder la question d'une alliance avec la France Insoumise, comme au Congrès de Marseille en 2023 : à la tête du PS depuis 2018 et partisan d'un rapprochement avec l'ensemble des forces de gauche, Olivier Faure faisait face à Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen, et Hélène Geoffroy, maire de Vaulx-en-Velin. La scission est maintenant actée, du moins dans les programmes : candidat à sa réélection, Faure défend une union de la gauche non-mélenchoniste pour 2027. Mayer-Rossignol, lui, souhaite un nouveau "Grand" Parti socialiste, capable de rallier les socio-démocrates de l'extérieur, quoique les concernés en pensent, Raphaël Glucksmann mais aussi Benoît Hamon et surtout Bernard Cazeneuve, un temps présenté comme potentiel premier ministre d'un compromis entre les socialistes et la majorité présidentielle.

Au-delà de la stratégie à adopter pour les présidentielles, il s'agit surtout de faire un bilan de la période fauriste. Pour les partisans du "Coeur de la Gauche", O. Faure a contribué à sauver un Parti socialiste en perdition depuis le quinquennat Hollande et à le rajeunir ; pour les opposants réunis autour du texte d'orientation (TO) "Changer pour Gagner", le Parti socialiste stagne et s'embourbe dans des coalitions "peu claires", dénonçant ouvertement une décision d'alliance avec La France Insoumise prise en petit comité.

O. Faure trouve pourtant le soutien d'une majorité des élus et "chefs" de l'actuelle direction du PS. A Nancy, son projet est notamment soutenu par le maire, Mathieu Klein, mais aussi par les députés socialistes Estelle Mercier et Stéphane Hablot, ainsi que par la présidente du département Chaynesse Khirouni. Si sa ligne n'est plus celle d'une défense à tout prix du Nouveau Front Populaire, il reconnaît vouloir se détacher du "social-libéralisme" qui pèse sur le Parti socialiste et défendre un "nouveau projet socialiste".

Derrière N. Mayer-Rossignol, on retrouve les pontes d'une social-démocratie à la Hollande, comme Hélène Geoffroy ou Jean-Christophe Cambadélis, ancien Premier secrétaire entre 2014 et 2017. Plus proche de nous, Dominique Potier, député de Meurthe-et-Moselle (dont les saillies conservatrices sur les questions sociétales ne sont pas passées inaperçues) a également affirmé son soutien. Mais il y a aussi les partisans d'un "renouveau populaire" du Parti socialiste, précédemment regroupés derrière le député de l'Eure Philippe Brun, qui a joint ses forces à celles de Mayer-Rossignol. Une apparente alliance contre-nature avec les défenseurs de l'héritage de la fameuse note Terra Nova, qui préconisait au PS de se tourner vers un électorat urbain et culturellement progressiste. Et pourtant, Anthony Perrin, secrétaire de la section PS de Nancy et mandataire pour Philippe Brun, déclarait : "Nous ne pouvons pas rester spectateurs de cette situation ou avaliser, de fait, la note Terranova [...] Le PS doit être, au sein de la gauche, le parti qui donne sa chance aux milieux défavorisés." Comme pour lui donner raison, le texte d'orientation de N. Mayer-Rossignol et P. Brun semble plébiscité par les socialistes des territoires ruraux de Meurthe-et-Moselle, comme dans le Toulois ou le Jarnisy. Ou faut-il y voir l'influence de quelques personnalités sur leurs sections ?

Vote du 27 mai : les résultats

Si le congrès de Nancy se tiendra physiquement du 13 au 15 juin, ses grands moments ont lieu en amont. Dès le mois de mars, les militants sont appelés à proposer des contributions thématiques et à discuter de contributions générales, parrainées par les élus au Conseil national. Autour de celles-ci se constituent des camps partisans qui s'engagent dans une bataille électorale et informationnelle qui a, par le passé, donné lieu à de forts déchirements au sein du PS. Des alliances se nouent pour aboutir aux textes d'orientations, dont le vote fixe la composition des instances du PS. Nous évoquions ainsi O. Faure mais aussi N. Mayer-Rossignol, finalement rejoint par H. Geoffroy et par P. Brun. Un troisième compétiteur est resté engagé dans la course : il s'agit de Boris Vallaud, chef des députés socialistes. Son texte, sobrement intitulé "Unir", interroge tant ses propositions semblent proches de celles d'O. Faure. Pour B. Vallaud, son intérêt est plutôt de briser la logique clanique au sein du PS, dénoncée par ses nombreux critiques, tout en maintenant un débat d'idées, comme la démarchandisation, manière de lutter contre les logiques de marché... sans vraiment remettre en cause le capitalisme.

Le vote sur les TO s'est donc tenu le 27 mai, portant Olivier Faure en tête, avec 42,21% des voix, suivi de près par Nicolas Mayer-Rossignol avec 40,38%. Boris Vallaud obtient 17,41%, arrivant même en tête dans certains départements. Difficile de parler de victoire pour qui que ce soit, tant les chiffres font peur : sur près de 40 000 adhérents, 24 700 votèrent, à peine plus qu'en 2023. Une chute drastique, entamée dès le congrès de Reims en 2008, qui comptait pas moins de 131 000 votants, et alors que le Parti socialiste était encore en position d'hégémonie il y a dix ans. Le vote de ce soir servira donc à départager les deux premiers pour le poste de Premier secrétaire, avec un probable report de voix des fidèles de B. Vallaud vers O. Faure.

Les rapports de force en Meurthe-et-Moselle

Selon les informations du Chardon, sur 319 adhérents socialistes, 63% votèrent : une forte majorité s'est exprimée en faveur d'O. Faure et du TO A avec 65%, avec 6,4% pour B. Vallaud et le TO B et enfin 27,6% pour N. Mayer-Rossignol et le TO C. Difficile de fournir une analyse pertinente de ce vote, tant l'échantillon est faible ; la moitié des sections du département comptent moins de 7 votants... Comme le reste du Parti socialiste, la fédération meurthe-et-mosellane rate son renouvellement, avec une timide arrivée de jeunes militants limitée à Nancy et des sections de plus en plus vides ailleurs, symptôme d'un PS qui peine à convaincre malgré l'enthousiasme de l'été dernier.

Mais des "bastions" locaux existent bien : la section de Nancy, largement acquise à Mathieu Klein, s'est exprimée massivement pour le TO d'Olivier Faure. Dans le fief toulois de Dominique Potier, les socialistes se sont tournés vers l'aile droitière du PS de manière quasi-unanime. On constate finalement l'importance des réseaux locaux, de l'influence de "notables" et d'une formation politique de plus en plus évidée idéologiquement chez les militants.

A Nancy comme en Meurthe-et-Moselle, l'issue semble connue d'avance. Les forces d'Olivier Faure devraient bel et bien l'emporter ce soir.