Société du spectacle : des policiers du 54 devant l’Assemblée nationale

La Rédaction
par La Rédaction
le lundi 10 février 2025
Société du spectacle : des policiers du 54 devant l’Assemblée nationale © Montage illustration Le Chardon

En prévention de potentiels et soi-disant manques de moyens à venir alloués par le budget 2025, récemment approuvé par le parlement, des policiers de Meurthe-et-Moselle manifestent leurs craintes, aussi hyper-réelles soient-elles.

Ce ne sont pas moins d’une trentaine de policiers de Meurthe-et-Moselle qui se sont rendus devant le Palais Bourbon, mardi 4 février 2025, pour faire entendre leur mécontentement, à la suite d’un appel national lancé par le syndicat policier Alliance. Provenant des commissariats de Nancy, Pont-à-Mousson, Lunéville, Dombasle-sur-Meurthe, Toul, Briey, Conflans et Longwy, ils ont pu dialoguer avec des représentants locaux, dont Thibault Bazin (Droite républicaine) ou encore Frédéric Weber (Rassemblement national). Leurs revendications ?  La sensibilisation aux soi-disant manques de moyens alloués à la police que le budget 2025 ne ferait que perpétuer, ou, en d’autres termes, la réception de plus de moyens pour plus de répression. Chimérique, l’appel à mobilisation, qui prend soin de rappeler que « le régalien reste la fonction fondamentale de l’Etat et la garantie de ses fondements » ou encore « qu’un Etat qui renonce à donner les moyens nécessaires à ses forces de l’ordre abdique devant la montée du chaos », est empreint d’un romantisme qui n’a d’égal que la fiction la plus fantaisiste.

 

Mais de quel chaos parle-t-on ? La préfecture de Meurthe-et-Moselle a publié lundi 3 février 2025 le bilan de la délinquance relatif à l'année 2024, et force est de constater que, selon les chiffres rapportés par France 3 Grand Est, nous assistons à une baisse de la délinquance générale (- 3,06 % par rapport à 2023) dans le département. La tendance est identique du côté des atteintes à l'intégrité physique (- 4,2 % pour les violences intrafamiliales) ou encore des vols sans violence commis contre les personnes (- 4,47 %). Les infractions relatives au trafic de stupéfiants sont aussi en baisse (- 2,5 %), tout comme la mortalité sur les routes (- 30 %). Des augmentations ont tout de même été constatées, et elles concernent les vols dans les véhicules (+ 3,12 %, principalement en zone urbaine), les vols de matériel et d'outillage (principalement en zone plus rurale) ou encore les cambriolages (+ 12,80 %, qu’ils impliquent résidences principales ou secondaires). Des chiffres qualifiés de globalement « encourageants » par François Capin-Dulhoste, procureur de Nancy, loin donc du « chaos » déploré par Alliance.

 

« Sécurité du quotidien, narcotrafic, cartellisation de la criminalité, défi migratoire, menace terroriste », telles sont les principales préoccupations d’Alliance, dont le secrétaire général, Fabien Vanhemelryck, avait déclaré l’année dernière en avoir « marre des raclures, des nuisibles, des jeunes d’origine étrangère », flirtant avec le racisme le plus abject. Lesdites préoccupations pourraient, en effet, facilement être décrites comme le reflet du spectacle communicationnel qu’est l’actuelle conjoncture du couple politico-médiatique, excité par les opérations marketing et phrases choc de Bruno Retailleau et Gérald Darmanin, eux-mêmes obnubilés par les « narco-racailles » ou la « mexicanisation du pays » qu’ils ont créées de toutes pièces par souci d’occupation de l’espace médiatique, exagérant les réalités tout en refusant d’admettre l’échec de leurs politiques répressives.

 

Parallèlement, le secrétaire départemental d’Alliance 54, Cyril Baudesson, s’inquiète et a donc appelé, comme ici-c-nancy.fr le rapporte, à « une loi de finances rectificative pour répondre aux nouveaux défis, notamment en matière d’immigration et de lutte contre le narcotrafic » tout en soulignant le fait que, selon lui, « le 54 est déjà en dessous des effectifs initiaux [...] alors que la délinquance, criminalité et dossiers ont explosé » : un argument aux antipodes de ce que démontrent les chiffres récemment parus, mais bien fidèle à l’hyper-réalité qu’on veut nous présenter.


Sans parler de la xénophobie latente que peuvent véhiculer une interrogation sur « le défi de l’immigration » (on peut penser ici au « sentiment de submersion migratoire » évoqué par François Bayrou) et une insistance sur le non-phénomène de « mexicanisation », les préoccupations d’Alliance relèvent quasiment de l’hypnose. A quand les appels aux programmes d’aides et à visées sociales, bien plus efficaces que la répression ? A quand le ré-examen profond des causes véritables du soi-disant « chaos » décrié ?